Une œuvre féministe retirée sous la pression d’associations musulmanes

Les islamistes ont-ils perdu suite au rassemblement national du 11 janvier comme on le prétend ? La liberté d’expression sera-t-elle vraiment mieux défendue en France aujourd’hui qu’hier ? Il est permis d’en douter.

Comme l’indiquent cet article de Libération et cet article de l’Express, l’artiste franco-algérienne Zoulikha Bouabdellah a retiré son œuvre Silence de l’exposition Femina juste avant son ouverture à Clichy. Cette installation était censée questionner la place de la femme dans l’islam et représentait des escarpins sur des tapis de prière. La tradition musulmane interdit aux fidèles des deux sexes de se mélanger, et les femmes se voient souvent réserver dans les mosquées des espaces séparés voire subalternes, quand ils existent. On se rappelle la polémique début 2014 suite à la relégation des femmes au sous-sol de la grande mosquée de Paris. On retrouve également cette ségrégation dans les synagogues, où hommes et femmes sont assis séparément, et dans les synagogues orthodoxes avec les mehitsa qui sont des séparations physiques. Ce n’est heureusement plus le cas dans les églises.

Ce retrait de l’œuvre fait suite aux pressions de la Fédération des associations musulmanes de Clichy retransmises par la Mairie de Clichy aux commissaires de l’exposition. Ces associations ont évoqué des menaces d’incidents, sans plus de précision sur le fait qu’elles soient réelles ou fantasmées, ce qui constitue dans le premier cas une méthode astucieuse de pression et dans le second un aveu des ambitions liberticides de certains musulmans.

Quant au maire socialiste de la ville, Gilles Catoire, il se dégage de toute responsabilité et refuse de prendre parti. Cette absence gênée de position illustre le retournement désormais achevé de la gauche française sur la question du droit à la critique des religions, par électoralisme ou antiracisme primaire (primauté des droits sur les devoirs), qui l’a conduite à l’abandon en pratique de la défense des droits des femmes.

Il n’est pas clair si c’est le manque de courage personnel, le souhait de n’endosser aucune responsabilité dans un éventuel nouveau drame, ou la volonté aveugle d’éviter des amalgames avec la conséquence de les valider, qui ont poussé l’artiste à cette autocensure, mais il est sûr qu’elle apporte une nouvelle preuve de l’accession de la critique des religions au rang de tabou national.